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PAC
PSN : tirer le meilleur, éviter le pire

Suite aux déclarations du ministre de l’Agriculture sur les grandes orientations du plan stratégique national qui va décliner la PAC 2023-2027 sur le territoire français, la profession salue à des degrés divers les premiers arbitrages, mais demande des efforts supplémentaires.

© C. Saidou

La FNSEA a été la première à réagir aux propos du ministre de l’Agriculture. La présidente de la FNSEA, Christiane Lambert, a parlé de «premiers arbitrages en demi-teinte». Certaines orientations semblent convenir au syndicat majoritaire comme la volonté affichée de reconquérir une souveraineté alimentaire qui s’était effritée au cours de réformes précédentes. Christiane Lambert a salué le plan protéines qui permet de passer «d’aides statiques, à des aides plus dynamiques». Elle qualifie «d’orientations majeures» le plan protéines pour le développement des cultures de protéagineux et de légumineuses fourragères et le renforcement de la structuration des filières par des programmes opérationnels. 

«Sacrifiés»

De même, la présidente de la FNSEA salue l’appui affiché du ministre pour renouveler les générations en souhaitant augmenter de 50 % les montants dédiés au paiement JA, ce qui consolide l’enveloppe à hauteur de 101 millions d’euros (M€). Sur ce point, les Jeunes Agriculteurs ont fait savoir que cette annonce constituait une «réponse notable à cet enjeu», mais une «première réponse à poursuivre», ont-ils nuancé. «Il est désormais nécessaire de transformer l’essai en mettant les contributions nationales (Etat et Régions) à la hauteur des engagements sur le Feader pour apporter une réponse pleine et entière. Sans cela, le travail mené restera vain», a réagi JA. La FNSEA a également trouvé «intéressant» l’accompagnement des Mesures agro-environnementales et climatiques (Maec) à hauteur de 250 M€, notamment à destination des zones à faible potentiel agronomique. Un sentiment également partagé par JA et l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA). Dans leur ensemble,  les organisations professionnelles agricoles  (OPA) saluent «une trajectoire de convergence raisonnable à 85 %», à l’exception toutefois de la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL) qui y voit «le travail de sape des exploitations de petite taille qui constituent la majorité des fermes laitières». Les éleveurs laitiers n’entendent pas être «encore sacrifiés, comme ils l’ont été lors des précédentes PAC», a dénoncé la FNPL.

Maximum d’efficacité

Les OPA s’inquiètent toutefois d’orientations encore floues ou non abouties, notamment sur les principales comme les ecorégimes (ecoschemes). Ainsi La Coopération agricole s'émeut-elle que «les programmes opérationnels, outils de transition et d’efficacité économiques, ne soient pas étendus à davantage de filières pour permettre leur structuration». Dans sa conférence de presse, Christiane Lambert a signalé que les écorégimes représentaient, dans le PSN, 1,684 Md€ sur les 6,8 Md€ du premier pilier de la PAC, soit 25 %. «On ne peut pas dire que ce ne soit pas exigeant et contraignant», a-t-elle affirmé, car la redistribution (versement) de ces aides est clairement conditionnée aux progrès réalisés par l’agriculteur sur son exploitation pour protéger l’environnement, la biodiversité, pour lutter contre le changement climatique.
Mais la FNSEA regrette que les critères d’application de cette mesure restent encore flous, car «l’objectif est d’encourager le maximum d’agriculteurs à entrer dans ces écorégimes, pour un maximum d’efficacité», a martelé Christiane Lambert qui parle d’une «mesure en demi-teinte». 

«Ça ne fait pas beaucoup»

Les OPA s’inquiètent aussi du sort réservé aux aides couplées et en particulier au critère alloué à Unité de gros bovins (UGB). «Une vache est une vache, une UGB est une UGB et tout autre choix sera dévastateur», a rappelé la FNPL. La présidente de la FNSEA insiste quant à elle, «sur le besoin d’accompagnement pour faire coller l’UGB aux demandes du marché». Autre déception affichée : celle de la gestion des risques, a souligné JA : «Nous rappelons que la PAC doit aussi accompagner les filières et protéger les agriculteurs face aux aléas climatiques», a-t-il déclaré. Le son de cloche est identique à l’APCA qui regrette «que les moyens en faveur d’une politique volontariste de gestion des risques n’aient pu être trouvées au sein de la PAC» mais aussi à la Coopération agricole qui s’inquiète «que le cadrage affiché ne permette pas d’affecter plus de moyens à la prévention et à la gestion de l’ensemble des risques». Christiane Lambert a regretté que l’enveloppe dédiée ne soit pas plus importante : «186 millions d’euros, ça ne fait pas beaucoup», a-t-elle lâché. Certes les agriculteurs «sont prêts à souscrire des polices d’assurance», sous-entendu, y compris légèrement plus chères, mais pas question pour la FNSEA que le financement de la future assurance récolte passe par une augmentation de la TVA et de la Taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), a-t-elle affirmé. La président de la FNSEA espère que le chef de l’Etat qui s’était engagé à activer la solidarité nationale le 18 mai dernier lors du Grand Rendez-vous, tiendra parole. D’autres ajustements viendront préciser ce PSN français, dont «beaucoup d’autres pays européens devraient s’inspirer», a conclu Christiane Lambert.

Réaction...
Philippe Jougla, président de la FDSEA du Tarn

"Le budget de la PAC est en baisse de 2% sur le premier pilier. On peut dire qu’on revient de loin, mais c’est une conséquence du Brexit qu’on n’avait pas trop vu venir. Les arbitrages du ministre sont dans le sens de la stabilité. C’est donc plutôt positif dans la mesure où les agriculteurs ne souhaitent pas avoir de gros changements tous les six ans. Il n’empêche que concernant les évolutions que nous voulions pour les céréaliers, avec un soutien pour la zone intermédiaire, il n’y a pas grand chose. Il n’y a pas non plus le budget pour développer l’assurance comme nous le réclamions. Je place cela comme des conséquences de cette certaine stabilité. Concernant la montée en puissance de l’aide aux protéines, il faut que le Tarn se mobilise pour y avoir accès. En miroir on assiste à une baisse des aides pour les filières bovines dont les modalités sont encore en discussion. On pourra plus ou moins limiter cette baisse en fonction du mode de calcul des animaux.
Au final, comme toujours en matière de répartition d’une enveloppe d’argent public,  tout le monde peut se sentir déçu.
L’écorégime est encore en discussion au niveau de Bruxelles. Notre objectif est que tous les agriculteurs puissent y avoir accès, soit à travers la reconnaissance des pratiques vertueuses en place, soit à travers des évolutions acceptables pour les économies des exploitations.
Les derniers arbitrages devraient être connus cet été. Il faudra nous mettre en ordre de marche dès la rentrée pour que tout le monde soit près. Il y aura un gros travail d’explication à fournir cet hiver pour que tout le monde accède à cet écorégime."

Le secteur bovin viande perdant

Le ministre de l’Agriculture l’a reconnu. Le Plan stratégique national de la PAC prévoit une baisse progressive des aides couplées au secteur de l’élevage de bovins de race à viande, pour financer le développement de la production de protéines végétales. En effet, près de 80 % de la hausse des aides couplées aux protéines végétales sera financée par un prélèvement de 0,3 % par an sur les aides bovines, selon la Fédération nationale bovine (FNB). Cette baisse des aides que Julien Denormandie estime à 3 à 4 % correspond «à une nouvelle diminution de 15 % du revenu des éleveurs», estime la FNB. Pour les éleveurs, la baisse s’accompagnera en plus «d’un accroissement du différentiel entre le coût de production des éleveurs - celui-ci étant calculé aides déduites, selon la méthode validée par l’Interprofession Interbev– et les prix des bovins à la production».
Pour la FNB «le secteur bovin sera le grand perdant de cette réforme». Au gouvernement d’en assumer les conséquences «en prenant de vraies mesures fortes et concrètes visant à contraindre les acteurs de la filière à changer d’attitude pour acheter, enfin, leurs animaux à un prix couvrant leur coût de production». A moins «d’assumer la disparition de ce secteur et toutes les conséquences de cette disparition sur le plan de la souveraineté alimentaire, de la vitalité des territoires et de la durabilité».

Céréaliers : Ils ne veulent plus subir de nouvelles baisses

Le président de l’AGPB, Éric Thirouin, considère qu’un certain nombre de décisions vont dans le bon sens, à condition que les décisions qui restent à prendre ne remettent pas en cause les orientations prises. “Cela faisait huit ans que les céréaliers subissaient des réformes catastrophiques au point qu’ils se retrouvent actuellement avec les revenus les plus bas de l’agriculture, note-t-il. Il était temps que le mouvement de baisse systématique à chaque réforme soit inversé, mais il reste encore à boucler les discussions essentielles sur les écorégimes, sur l’assurance récolte, sur l’accès à l’eau et la fin du trilogue, pour réellement porter un jugement sur cette réforme pour les céréaliers.” Selon lui, “une attention particulière a été accordée aux zones intermédiaires avec un fléchage de 30 millions pour les mesures environnementales et climatiques (Maec) pour les grandes cultures”. Il y a aussi un “engagement d’un renforcement des investissements dans les zones à faible potentiel. Sur ce sujet, les décisions qui seront prises entrent dans une période d’incertitude en raison du renouvellement prochain des Conseils régionaux ou du moins seront retardées”. L’engagement de renforcer les aides couplées aux protéagineux et aux plantes riches en protéines pour les grandes cultures et dans les zones de plaine “va également dans le bon sens, sans oublier l’importance du soutien aux filières blé dur et riz. Idem pour la convergence limitée et progressive à 85 %, même si elle sera positive pour certaines exploitations et négative pour d’autres.”

Les éleveurs de montagne et des zones défavorisées s’estiment affaiblis

Les éleveurs du Massif central, des Alpes, des Pyrénées et du Jura «constatent avec amertume que leurs territoires et productions pourraient être les principaux contributeurs au développement de la production de protéines végétales». Même s’ils saluent le maintien du budget de l’ICHN pour la prochaine programmation budgétaire, ils déplorent que «la stabilité budgétaire n’ait pas permis de privilégier les actifs agricoles». Ils en concluent que la prochaine PAC ne sera pas celle de la reconnaissance des actifs, ni même de l’ensemble des services rendus par l’agriculture de montagne et des zones défavorisées. «Les nombreux atouts environnementaux des systèmes herbagers et pastoraux de ces territoires ne semblent, à ce jour, pas faire l’objet d’une reconnaissance spécifique dans le cadre de l’éco-régime» et les exploitations d’élevage de ces zones pourraient être les plus fortement et les plus négativement impactées par la hausse des aides couplées en faveur de la production de protéines végétales, observent-ils. En outre, les exploitations des zones de montagne et défavorisées ne pourront pas accéder à une partie des aides couplées aux protéines végétales fourragères pour améliorer l’autonomie de leur exploitation, à cause du climat et des dénivelés.

Agriculture biologique : le budget augmente mais l’aide au maintien disparait

Les arbitrages de la PAC s’accompagnent de vives réactions sur la question du financement de l’accompagnement de l’agriculture biologique. Interpellée par des chiffres alarmistes dont la construction peut être questionnée, la FNSEA souligne quelques éléments d’éclairage pragmatiques, en fonction des données PAC connues à ce stade des négociations. “Le budget annuel FEADER dédié à l’agriculture biologique passe de 250 millions d’euros sur la programmation en cours à 340 millions d’euros dans la prochaine programmation PAC, et ceci sans prendre en compte le budget des éco-régimes dont bénéficieront les agriculteurs bio de manière automatique, souligne Brice Guyau, vice-président de la commission bio de la FNSEA. Cela représente une hausse de 36%, pour un budget total de 1,7 milliard d’euros. Cette hausse vise à accompagner un nombre plus important de conversions, et pourra également permettre une revalorisation des aides à la conversion aux agriculteurs.” Pour pallier la perte de l’aide au maintien, “les agriculteurs bio pourront bénéficier d’un crédit d’impôt dès lors qu’au moins 40% de leur chiffre d’affaires provient de productions certifiées bio, poursuit-il. Ce crédit d’impôt bio s’élève à 3500 € et il est cumulable avec les autres aides bio du second pilier dans une limite de 4000 € de soutiens au total.” Selon lui : “l’agriculture biologique a réussi son essor et a rencontré son marché. Il faut veiller à maintenir cette valorisation. Le prix payé au producteur doit permettre de prendre le relai pour couvrir les charges après les cinq années de soutien à la conversion.” 

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