Luzerne porte graines : les producteurs s'interrogent
Le Sams 81 a tenu son conseil d'administration dans un contexte de baisse régulière des rendements. La filière se pose les questions pour enrayer ce phénomène.
Les membres du Syndicat des agriculteurs multiplicateurs de semences du Tarn (Sams 81) se sont réunis à Lavaur pour le conseil d'administration annuel, le 15 octobre.
Après une année compliquée climatiquement parlant, l'heure était au bilan.
C'est sans surprises et à l'image des cultures conventionnelles que les résultats en semences potagères et fourragères sont aussi contrastés.
Parmi ces espèces, une a particulièrement fait parler d'elle pendant le conseil : la luzerne.
Cela fait maintenant cinq ans que les rendements n'atteignent pas la moyenne des 15 dernières années. Pire, ces rendements sont en baisse constante sur les derniers exercices avec - 44% entre 2016 et 2019. Le prix rémunéré au quintal suit la même tendance de fond avec une baisse de 8% entre 2015 et 2020. Ainsi, le chiffre d'affaires dégagé par la culture n'arrive plus à couvrir les charges de production.
Les questions se font de plus en plus nombreuses pour tenter de trouver des explications.
Est-ce les conséquences du changement climatique ? Du retrait de certaines matières actives ? De la génétique des variétés proposées ? Concernant le changement climatique, on pourrait se questionner sur les températures maximales que la culture de luzerne peut supporter. Le recours à l'irrigation semble être une des solutions à approfondir. Un tour d'eau bien positionné semble montrer un réel intérêt sur le rendement final d'après la Fnams. Mais quel est le stade de la culture optimal pour apporter de l'eau ?
Le retrait de certaines matières actives comme l'acétamipride, famille des néonicotinoïdes a également fragilisé la lutte contre les ravageurs. Le tychius devient un problème majeur sur la culture.
Avec une volonté européenne forte de diminuer drastiquement les intrants chimiques, la Fnams a opéré un véritable virage technique au cours de ces dernières années pour tenter de trouver de nouvelles solutions face à ces ravageurs. Malheureusement, à l'heure actuelle, peu de solutions autres que chimiques montrent une réelle efficacité contre le tychius et les autres insectes.
Pourtant, malgré ce contexte morose, il existe des perspectives encourageantes :
o le gouvernement va consacrer 100 millions d'euros au développement des protéines végétales dans le cadre du plan de relance afin d'arriver à terme à une autonomie protéique végétale en France.
o l'extensification des exploitations en polyculture/élevage donne une place de choix à la luzerne dans les assolements.
o la demande en luzerne continue d'augmenter chez les éleveurs.
Nombreuses sont les interrogations quant au devenir de la luzerne porte-graine. Mais ces interrogations sont également présentes au niveau de toutes les espèces fourragères de multiplication. Pour y répondre le plus rapidement possible, la section semences fourragères et gazons du Gnis a développé un accord interprofessionnel en juin 2019 qui renforcerait l'innovation pour l'obtention et la production de plantes fourragères et de service pour les récoltes 2020, 2021 et 2022 (lire encadré).
P-A. Marre (CA81)
Un accord interprofessionnel
Cet accord se structure autour de six engagements :
1. Renforcer l’effort de recherche pour trouver de nouvelles variétés mieux adaptées aux pratiques agro-écologiques
2. Expérimenter à grande échelle les solutions les plus efficaces, notamment issues du programme d’actions techniques confiées à la FNAMS pour maintenir un niveau de production qualitatif tout en faisant évoluer les pratiques et assurer la diffusion et leur appropriation par l’ensemble des agriculteurs-multiplicateurs.
3. Réaliser un travail d’expérimentation spécifique en agriculture biologique
4. Mener une réflexion sur un système de caisse de risque pour les agriculteurs-multiplicateurs
5. Assurer une diffusion large des techniques agro-écologiques et de celles adaptées à l’agriculture biologique impliquant l’utilisation d’espèces fourragères et de plantes de service.
6. Poursuivre l’analyse de la compétitivité de la filière et la répartition de valeur au sein de celle-ci.