Sanitaire : «Les problèmes de pieds chez les animaux sont complexes car multifactoriels»
Cela fait plus de vingt ans que Joël Albenge est pareur bovin. Cette activité, d'abord secondaire, l'occupe aujourd'hui à temps plein. En effet, les problèmes de pieds ne font pas en diminuant dans les élevages bovins lait ou viande. Interview.
Joël Albenge, vous êtes pareur bovin et vous travaillez en grande majorité dans les élevages tarnais. Pouvez-vous nous décrire les principales lésions des pattes que vous rencontrez ?
Joël Albenge : Le pied d’un bovin peut dégénérer de multiples façons. La complication la plus fréquente, c’est le décollement de muraille. Il s’agit de la partie externe du sabot. Elle peut s’ouvrir jusqu’au vif à cause d’une blessure ou d’une fragilité. Dès que la lésion atteint le tissu sensible, cela devient douloureux pour l’animal, il se met à boiter. Cela peut guérir tout seul, mais cela peut aussi s’infecter et un abcès peut se créer. L’autre grand problème que je rencontre, ce sont les cerises. C’est une zone au niveau du vif qui dégénère et qui ne produit plus de corne. Apparait alors une ulcération. C’est une lésion plus inquiétante, parce qu’elle a rarement une cause accidentelle. Il s’agit d’un dysfonctionnement plus profond du pied. Il y a enfin la dermatite digitée, appelée aussi maladie de Mortellaro, qui se développe beaucoup actuellement. Des bactéries s’engagent dans le vif du pied, créant des ulcères voire des nécroses. Ces problèmes sanitaires peuvent, dans certains élevages, prendre énormément d’ampleur !
Existe-t-il des solutions pour endiguer cette maladie ?
Joël Albenge : Non aujourd’hui, les éleveurs ont très peu de solutions. C’est une maladie que l’on connaît très mal. Pour moi, en tant que pareur, c’est très compliqué à soigner. Souvent, quand j’interviens, c’est que l’infection est importante et que les bactéries sont «rentrées» dans le pied. Les nécroses sont alors très douloureuses et plusieurs interventions sont nécessaires avant d’arriver à soigner le bovin. Quand c’est encore possible. La surveillance est donc de mise pour intervenir le plus tôt possible, dès que la fraise apparaît. Cette maladie est fortement contagieuse et on ne sait pas vraiment comment elle se transmet. Dès qu’elle est présente sur l’élevage, il est donc fortement conseillé de procéder à des traitements préventifs collectifs, via le pédiluve ou de la pulvérisation. J’accompagne souvent les éleveurs pour la mise en place de ces pratiques. On échange sur la fréquence, les produits, le mode d’application… mais c’est avant tout à l’éleveur de trouver le système qui lui convient le mieux ! Et lorsque l’on a la chance de ne pas être embêté sur son élevage, il faut bien penser à soulever les pieds quand on achète un bovin. Cela peut éviter de très mauvaises surprises. Ceci dit, les vaches peuvent être porteuses et ne pas l’exprimer. De toute façon, il faut rester attentif !
Propos recueillis par S. Lenoble
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