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Commercialisation
L’importance de ne pas détricoter la Loi Egalim

La FDSEA du Tarn et tout le réseau FNSEA ont désapprouvé la proposition du Ministre Bruno Le Maire de ré-autoriser les promotions à 50%. Explications sur le message passé.

© Reussir SA

Alors que les agriculteurs et les filières s’engagent dans une alimentation toujours plus sûre, plus saine et plus durable, le Ministre sous les coups de pression de Leclerc était prêt à revenir sur ces engagements et cette transition en mettant à mal les dispositions de la loi EGalim ! Qui va en pâtir ? Ceux qui sont censés être défendus par ces initiatives, à savoir les consommateurs, qui, à terme, n’auront comme choix que des produits bas de gamme, importés, ne respectant aucun standard de production français et en promotion permanente. Est-ce l’alimentation que veulent proposer Leclerc et Bruno Le Maire aux Français ?

Les fondements

L’objectif d’EGalim est d’améliorer la rémunération des producteurs : faut-il rappeler que nous n’avons pas encore atteint le résultat escompté, mais pour autant EGalim 2 a apporté une plus-value déjà identifiée dans les négociations du 1er mars (+ 3,5 % après huit années de déflation). Est-ce qu’une fois le chemin tracé, il faudrait tout arrêter pour céder aux sirènes de l’enseigne Leclerc qui n’a que pour unique ambition d’augmenter sa part de marché et de rentabiliser au maximum ses magasins ?
Rappelons qu’en lait, viande bovine et porc, les coûts de production augmentent plus vite que les prix à l’amont, comme l’atteste le rapport de l’observatoire des prix et des marges (OFPM).
Par ailleurs, l’inflation en France est inférieure à celle au niveau européen et dans les principaux pays, c’est en partie dû aux mesures du Gouvernement. Mais celles-ci ne doivent pas aller jusqu’à détricoter une loi phare du précédent quinquennat. Les efforts pour contenir l’inflation alimentaire doivent aussi venir des distributeurs qui peuvent rogner sur les marges engrangées depuis la crise Covid (rapport 2022 de l’OFPM).

Remise en cause des promotions 

BLM : “Je propose qu’on relève ce seuil à 50% pour qu’il y ait des prix cassés pour ceux qui en ont besoin.”
Rappel de la mesure : encadrement des promotions (34 % en valeur = «1 acheté, 1 offert» interdit et 25 % en volume = sur un contrat, pas plus de 25 % des volumes vendus sous promotion).
• Il s’agirait d’un détricotage de la loi EGalim qui avait montré que la loi permettait de réduire la destruction de valeur. Il y a un consensus entre les acteurs de la filière pour démontrer que cette mesure a redonné de la valeur au produit alimentaire, ainsi que des indications sur les prix aux consommateurs et même une limitation du gaspillage alimentaire. C’est une mesure vertueuse !
• Cibler les plus modestes dans les promotions initiées par les distributeurs ne semble pas possible : cela n’ira pas dans le sens du souhait de Bruno Le Maire.
• Cette mesure, selon le panéliste IRI, n’a pas enlevé d’attractivité aux rayons des enseignes : le consommateur a payé un peu plus cher sans se détourner des produits. Aujourd’hui l’inflation est plus forte, mais il existe une catégorie de produits (MDD/1ers prix) pour répondre aux demandes des consommateurs les plus modestes. Il n’y a pas besoin de revenir sur le dispositif EGalim, fruit d’un long consensus, à l’ouverture du premier quinquennat Macron.
• Dans le premier rapport du Gouvernement sur l’évaluation du SRP et de l’encadrement des promotions, il a été démontré que l’enjeu initial d’EGalim avait été atteint, à savoir stopper la croissance d’achats de produits alimentaires sous promotions. Nielsen constate que le poids des ventes réalisées sous promotion a baissé pour atteindre 20 % (périmètre PGC), soit – 0,6 % sur un an. Pour l’alimentaire, le taux est de 18,5 %. Le nombre d’opérations promotionnelles a baissé lui de 8 % avec un taux moyen de baisse des prix de l’ordre de 25 % par promotion. Ce taux a principalement chuté sur des catégories misant fortement sur cette stratégie (- 16 % sur le jambon cru, - 12 % sur les produits sucrants, - 10 % sur les compotes et le café…).
• Cette baisse du poids promotionnel est à nuancer puisque les distributeurs ont trouvé d’autres recours – non pris en compte dans les statistiques présentées - pour baisser les prix des produits et attirer le consommateur (objectif souhaité par BLM) :
- Les promotions sur la viande fraîche notamment sont plus difficilement contrôlables car le prix barré n’est plus affiché. Or il s’agit du point de référence pour calculer la promotion. On voit se développer des annonces littéraires du type «prix choc», «prix bas» qui permettront de brader des produits alimentaires tout en respectant l’expérimentation prévue par la loi EGAlim !
- La proposition à titre gratuit de produits non alimentaires lors d’achats de produits alimentaires, financés par le fournisseur (ex. : un tire-bouchon offert pour l’achat d’une bouteille de vin).

Abus dans la chaîne d’approvisionnement

BLM : “Les contrôles vont être multipliés pour voir si des marges inacceptables sont prises dans les différentes filières, de la production aux transports en passant par le stockage.
Nous ne laisserons pas passer les profiteurs de la crise inflationniste”. “Nous allons faire des contrôles par filière entière, regarder si depuis l’usine jusqu’au lieu de distribution, en passant par le transport ou le stockage, des marges révoltantes sont faites. Ceux qui en profitent seront sanctionnés.”

Si ces marges sur des produits à forte composante agricole sont avérées, nous souhaitons effectivement que la lumière soit faite !
Exemple sur des chiffres récents publiés :
• CMA CGM, numéro 3 mondial du secteur ont atteint des sommets historiques au premier trimestre avec 7,2 milliards de dollars engrangés.
• Nestlé engrange plus de 16 milliards d’euros de bénéfices en 2021 (+7,5 %).
Les agriculteurs ne profitent d’aucune situation, ils la subissent avec la hausse très forte de leurs coûts de production : il ne serait pas admissible qu’à un quelconque maillon (transport, intrants, industrie, distribution), il y ait des opérateurs qui jouent le jeu de la spéculation. Mais la suspicion ne doit pas laisser place à un blocage dans la transmission des prix, car ce serait alors l’ensemble des agriculteurs qui en seraient les victimes, car les coûts de production sont subis depuis plusieurs semaines, sans augurer de ralentissement à court terme.
Chaque semaine, les distributeurs accusent les fournisseurs de «chantage à la promotion» et aujourd’hui il faudrait en faire encore davantage et encore plus agressives en prix. Or plutôt que parler de chantage, il vaudrait mieux parler de «ruptures» car il y a des tensions à la production (agricole et agroalimentaire) qui limitent la capacité des fournisseurs à garantir des livraisons comme en temps «normal». Enfin, aujourd’hui les fournisseurs privilégient les distributeurs qui acceptent les hausses de tarifs cohérentes avec la hausse des charges subies, ce n’est donc pas du chantage mais du pragmatisme.

La FNSEA et JA se mobilisent et obtiennent gain de cause

La FNSEA et Jeunes Agriculteurs ont rencontré Bruno Le Maire pour signifier la désapprobation totale au ministre de tout le réseau syndical. A la suite de la réunion à l’Elysée consacrée à la préparation de la Loi inflation celui-ci a confirmé :
• qu’il n’y aura pas de retour en arrière sur le SRP à 10% (contrairement aux demandes intempestives de M. Leclerc)
• qu’il n’y aura pas de changement pour la limitation des promotions à 34 % des volumes, donc pas de passage à 50 %.
• que l’ensemble du dispositif EGAlim 2 est maintenu pour un meilleur retour de valeur aux agriculteurs
• qu’une inspection générale des finances sera lancée lundi prochain sur 15 produits du quotidien ainsi que des enquêtes filières. Un représentant de chacune de nos organisations prendra part à l’inspection générale, suite à nos demandes expresses
• que le guichet ouvert pour faire remonter toute pratique abusive est bien maintenu.
La mobilisation des réseaux FNSEA et JA a une fois encore prouvé son efficacité !

L’avis des responsables syndicaux

«Ce n’est pas aux agriculteurs français de se mettre dans le rouge pour certains. Les super promos sur l’alimentation ne sont pas la solution et ne peuvent qu’affaiblir l’outil de production agricole ! Je demande la transparence de chaque acteur de la chaîne de production et de distribution alimentaire” indiquait à la presse Christiane Lambert.
Pour Laurent Viguier, co-secrétaire général de la FDSEA 81, “le consommateur a été historiquement habitué à payer sa nourriture en dessous de son prix réel. Les victimes (les parfois esclaves) de ce système sont les agriculteurs producteurs. Les produits agricoles ont un prix qu’il ne faut pas brader, afin que les agriculteurs puissent vivre dignement de leur métier.”
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